L’Église ne peut pas faire meilleur cadeau au monde que de lui donner l’espérance

    Une façon de rendre l’espérance active et contagieuse est celle que formule saint Paul lorsqu’il dit que « la charité espère tout » (1 Co 13, 7). Cela s’applique non seulement à la personne individuelle, mais aussi à l’Église dans son ensemble. L’Église espère tout, croit tout, endure tout. Elle ne peut se limiter à dénoncer les possibilités de mal qui existent dans le monde et la société. Il ne faut certainement pas négliger la peur du châtiment et de l’enfer, et cesser de mettre en garde les gens contre les possibilités de mal que comporte une action ou une situation, comme les blessures infligées à l’environnement. L’expérience montre toutefois que l’on obtient davantage par des moyens positifs, en insistant sur les possibilités de bien ; en termes évangéliques, en prêchant la miséricorde. […].

    Mais de cette manière, ne nous exposons-nous pas – dit-on – à être déçus et à paraître naïfs ? Voilà la grande tentation contre l’espérance, suggérée par la prudence humaine, ou par la peur d’être contredit par les faits […].

    L’Église ne peut pas faire meilleur cadeau au monde que de lui donner l’espérance, non pas des espérances humaines, éphémères, économiques ou politiques, sur lesquelles elle n’a aucune compétence spécifique, mais l’espérance pure et simple, celle qui a aussi, sans le savoir, l’éternité comme horizon et Jésus-Christ et sa résurrection comme garants. Ce sera alors cette espérance théologique qui servira de tremplin à toutes les autres espérances humaines légitimes. […]

    L’espérance ainsi comprise transforme tout ce qu’elle touche. Son effet est merveilleusement décrit dans ce passage d’Isaïe :

Les garçons se fatiguent, se lassent,

et les jeunes gens ne cessent de trébucher,

mais ceux qui mettent leur espérance dans le Seigneur trouvent des forces nouvelles ;

ils déploient comme des ailes d’aigles,

ils courent sans se lasser,

ils marchent sans se fatiguer. (Is 40, 30-31)

Dieu ne promet pas de supprimer les motifs de fatigue et d’épuisement, mais il donne l’espérance. La situation reste ce qu’elle était, mais l’espérance donne la force de s’élever au-dessus. Dans le livre de l’Apocalypse, nous lisons : « Et quand le Dragon vit qu’il était jeté sur la terre, il se mit à poursuivre la Femme qui avait mis au monde l’enfant mâle. Alors furent données à la Femme les deux ailes du grand aigle pour qu’elle s’envole au désert, à la place où elle doit être » (Ap 12, 13-14). L’image des ailes de l’aigle s’inspire clairement du texte d’Isaïe. On en vient donc à dire que c’est toute l’Église qui a reçu les grandes ailes de l’espérance, afin qu’avec elles elle puisse à chaque fois échapper aux attaques du mal, et surmonter les difficultés avec élan.

 

Raniero Cantalamessa, Prédication d’Avent, 9 décembre 2022 (Extraits).